La résolution d’un contrat de vente a pour conséquence la restitution du prix de vente, pour le vendeur, et la remise de la chose, pour l’acheteur. La restitution, en principe intégrale, doit cependant tenir compte de l’équité. La première Chambre civile de la Cour de cassation vient pourtant de confirmer sa jurisprudence – très contestable – qui consiste, en cas de résolution de la vente pour vices cachés, à refuser au vendeur, tenu à restitution, une réfaction du prix à raison de la diminution de la valeur vénale de la chose consécutive à son usage (Cass.  1re civ. 19 février 2014, LawLex20140000332JBJ).

En l’espèce, un constructeur automobile, tenu à garantie dans le cadre d’une chaîne de contrats de ventes successives, soutenait que l’usure du véhicule devait être prise en compte dans la restitution du prix. Selon lui, l’automobile en cause, acquise pour un montant de 35 000 euros, n’en valait plus que 9000 (valeur en bon état), dès lors qu’elle avait été utilisée pendant cinq ans et avait parcouru plus de 122 148 km. La résolution ayant pour effet de remettre les parties dans l’état dans lequel elles se trouvaient au jour de la vente, le concédant invoquait une violation de l’article 1184 du Code civil, la non-prise en compte de l’usure conduisant finalement à la remise par l’acheteur d’une voiture usagée tandis que le vendeur, lui, doit s’acquitter de l’intégralité du prix de vente. Enfin, le constructeur soutenait, au visa de l’article 1371 du Code civil, qu’il en résultait nécessairement un enrichissement sans cause de l’acheteur, qui avait bénéficié, en fin de compte, de l’utilisation gratuite du véhicule pendant cinq ans, au détriment du fabricant qui, lui, récupérait un véhicule dont la valeur avait nécessairement été dépréciée par l’usage.

La Cour de cassation est restée de marbre devant cette argumentation qui tient pourtant compte l’écoulement du temps et de la réalité économique : « après avoir prononcé la résolution de la vente, c’est à bon droit que la cour d’appel […] a retenu que le vendeur était tenu de restituer le prix qu’il avait reçu, sans diminution liée à l’utilisation de la chose vendue ou à l’usure en résultant […] ». La cour d’appel avait considéré dans cette affaire (Versailles, 12 janvier 25012, LawLex201200001614JBJ) qu’une diminution du prix restitué par le vendeur pour dépréciation ne se justifiait pas dès lors que « à l’origine de la diminution de valeur se trouve une situation tenant au vendeur ou plus précisément au bien qu’il a vendu » et « que l’acquéreur ne peut supprimer l’usage de ce véhicule intervenu en toute bonne foi ».

La position de la Haute juridiction qui  n’est, hélas, pas nouvelle (V. déjà, Cass. 1re civ, 11 mars 2003,  LawLex200400003428JBJ ; Cass. 1re civ., 21 mars 2006, LawLex20060000933JBJ et LawLex20060000932JBJ (2 arrêts)  ;  Cass. 1re civ., 30 septembre 2008, LawLex200400003428JBJ) n’est pas exempte de critiques. D’abord, et c’est paradoxal, l’usure est admise par la Cour de cassation, lorsque la résolution de le vente est fondée sur un défaut de conformité (Cass. 1re civ., 21 mars 2006, Lawlex20060000930JBJ). Deuxièmement, elle est prise en considération dans de nombreux contrats (assurance, location, etc) liant les consommateurs à des professionnels. Enfin et surtout, la prise en compte de l’usage correspond à une réalité économique et milite en faveur d’une certaine équité, totalement niées en l’espèce. Alors pourquoi persévérer dans l’erreur ?