La Commission européenne a publié la semaine dernière les conclusions de l’évaluation de la communication sur la définition des marchés pertinents. Cette évaluation conclut à la nécessité de réviser ce texte en vigueur depuis 1997 notamment pour tenir compte du développement du numérique Toutefois, aucune modification concrète n’a encore été publiée par la Commission.

Les conclusions de l’évaluation de la Commission sont néanmoins d’ores et déjà utiles car elles peuvent être invoquées dans le cadre de dossiers de concentration ou de pratiques anti-concurrentielles en cours pour appuyer une demande d’évolution des définitions de marchés.

•   Rappel du contexte

En décembre 2019, la Commission européenne a engagé une réflexion sur l’évolution de la définition des marchés pertinents, lesquels sont actuellement définis sur la base d’une communication publiée en décembre 1997 (la « Communication »).

Le 3 avril 2020, la Commission a publié sa feuille de route pour l’évaluation de la Communication en rappelant les deux évolutions majeures du contexte économique l’ayant incitée à entamer cette réflexion, à savoir la digitalisation et la mondialisation de l’économie.

Les principales étapes de cette feuille de route étaient les suivantes :

– lancement d’une consultation publique de juin à octobre 2020 au moyen d’un questionnaire;
– discussions avec les autorités nationales de concurrence de l’UE ainsi qu’avec des experts ;
– réalisation d’une étude externe à l’appui de l’évaluation de la Communication.

Le 12 juillet 2021, la Commission a publié un document de travail qui résume le résultat de cette évaluation et conclut en faveur d’une mise à jour de la Communication. La Commission n’a pas précisé dans quel délai les ajustements nécessaires pourraient être réalisés.

•   Conclusions de l’évaluation de la Communication

Selon les acteurs interrogés, la Communication reste un instrument utile mais elle ne reflète pas toujours l’évolution de l’approche de la Commission concernant la définition de marché ni l’évolution de la jurisprudence de la CJUE, en particulier concernant la définition des marchés du numérique.

Les participants à la consultation publique ont notamment souligné :

– le rôle grandissant des données, qui devrait être pris en considération dans la définition des marchés de produits/services pertinents ;
– la nécessité de prendre en considération les contraintes concurrentielles grandissantes des services en ligne sur les services traditionnels ;
– que l’idée selon laquelle le prix est le paramètre principal de concurrence est obsolète et que les acteurs ont besoin de plus d’orientations sur la façon d’évaluer la substituabilité du côté de la demande en matière de services numériques ;
– le besoin, pour les autorités nationales de concurrence, d’orientations sur la manière d’analyser les marchés mondiaux ;
– le risque de continuer à se fonder sur des parts de marché « statiques » sur des marchés numériques qui sont des marchés dynamiques et qui par définition évoluent rapidement.

La Communication pourrait ainsi faire l’objet d’une mise à jour concernant :

– l’utilisation et la finalité du test SSNIP dans la définition des marchés pertinents ;
– les moyens de définir les marchés numériques, en particulier (i) les marchés des plateformes multifaces, notamment ceux concernant des produits ou services commercialisés à un prix monétaire nul ou (ii) les marchés des « écosystèmes » numériques, qui font référence à des situations dans lesquelles une plateforme numérique offre une variété de produits et de services complémentaires en plus de ses produits de base (ex : Amazon, Google, Facebook, etc.) ;
– les moyens d’évaluer la concurrence en ligne par rapport à la concurrence hors ligne ;
– l’évaluation des marchés géographiques dans un contexte de mondialisation et de concurrence des importations ;
– les techniques quantitatives et la disponibilité de données qui facilitent la définition de marché (certaines autorités nationales ont suggéré que le futur texte puisse mentionner l’utilisation des isochrones et zones de chalandise) ;
– le calcul des parts de marché ;
– la concurrence non tarifaire (notamment sur le plan de l’innovation).